Au fin fond du sous-sol parisien on ne t'entends plus rigoler...

D'abord, une brève introduction façon "excentriques anonymes" : je suis cataphile. Ou plutôt je l'étais, vu que je ne descends plus que très rarement dans les sous-sol parisiens (carrières, galeries techniques etc.). Forcément, quand j'ai vu les affiches se mettre à pulluler sur les couloirs parisiens, je me suis précipité comme un seul homme (ou plutôt trois, avec ma compagne et un ami). Il est amusant de noter que la salle était d'ailleurs remplie en grande partie de gens familiers des lieux évoqués. Heureusement que ce n'était pas une avant-première en présence de l'équipe, car je ne suis pas sûr qu'ils auraient aimé un public se poilant à leur film d'horreur...

L'affiche est bien vue et le titre anglais, As Above, So Below (qu'on traduira par "Sur la Terre comme au Ciel" plutôt que littéralement comme dans les sous-titres) est heureusement remplacé par un titre plus "dans ta face", à savoir CATACOMBES. Brrrr. Evidemment, sur moi et la paire de centaines de gugusses qui vont s'y balader regulièrement, ce titre fonctionne comme la bière avec les limaces, d'où le public particulier de la séance d'hier.

L'histoire : une jeune fille poursuit la quête insensée de son père pour trouver la pierre philosophale de Nicolas Flamel. Elle détient son journal et parcourt le monde pour compléter la série d'énigmes laissées par les anciens et rassemblées par son père dans son journal. Oui, si ça vous rappelle Indiana Jones Et La Dernière Croisade, c'est bien ça. La dernière étape en Iran l'amène à Paris, où elle va résoudre quelques énigmes dans des lieux connus (le Louvre, St Sulpice, l'Ossuaire Officiel, les carrières). La descente dans les carrières (improprement appelée "catacombes" à cause de l'Ossuaire Officiel - OssOff pour les intimes) représente l'aboutissement de cette recherche et là où les épreuves vont se multiplier, dans les galeries étouffantes et labyrinthiques du sous-sol parisien.

D'un point de vue strictement cinéphile, c'est pas fou. Le film est tourné entièrement caméra à l'épaule vu que le principe c'est qu'un des membres du groupe a un camescope et que les autres ont des Go-Pro. Si vous avez le mal de mer, ce film réveillera sûrement quelque chose en vous... Cette façon de tourner, qui n'est pas sans rappeller Cannibal Holocaust et Blair Witch, a l'avantage de permettre des petits effets pas cher mais efficaces pour l'angoisse, à condition de ne pas en abuser. Et c'est là un des gros problèmes du film : ils en font tout le temps trop. Le "chat monté sur ressort" - machin qui saute à la gueule du personnage et donc du spectateur pour le faire sursauter, c'est bien une fois, c'est naze au-delà. Le remplissage de certaines scènes - dites "Ikea" parce qu'elles servent à meubler, comme celle où l'héroïne se retape tout le parcours à l'envers en courant et en filant des coups de tête-balayette aux monstres qu'elle croise. Il y a aussi le parcours en miroir histoire de doubler la longueur l'air de rien, etc. Il y a aussi l'abus de la deadline : "attention, la grotte va exploser, vitevitevite", "attention, les cloches vont sonner, vitevitevite", et d'autres, qui fatiguent le spectateur. Et les "grèves du chef éclairagiste", c'est à dire la lumière qui s'éteint et on entend des bruits qui font peuuuur.
Beaucoup, beaucoup de ficelles et clichés du film d'angoisse, usés jusqu'à la corde, sont présents ici. Les acteurs sont pas mauvais mais leurs dialogues, eux, par contre... Par exemple, quand les cataphiles français, qui guident l'héroïne et son équipe, se blessent ou s'apostrophent, pourquoi le font-ils en anglais ? Ils parlent français régulièrement mais pas dans les moments de stress ?
C'est ce genre de petites bizarreries, accumulées, qui deviennent vites lourdes. Bref, on a hâte que le film se termine, il est long et répétitif.

D'un point de vue cataphile, j'ai bien aimé le fait qu'ils aient réellement tourné dans les carrières (avec l'aide de RFF* et de l'IGC*), même s'ils grillent l'entrée dite "touristique". En même temps, elle est tellement grillée... C'était amusant de reconnaître les lieux, les galeries, les salles. Par contre, le défaut, c'est qu'on sait où ils sont et ça brise un peu le film. De fait, l'entrée touristique ne fait pas tomber direct dans la salle appelée "La Plage". Y'a une marche un peu longue et un peu chiante d'abord. C'est marrant de reconnaître le plan qu'ils utilisent pour se guider mais dommage de prétendre au même moment que le réseau décrit sur ce plan va jusqu'au nord de la Seine (il s'arrête au Luxembourg). Etc. C'est au final la même malédiction de tout Sheldon qui va voir un film parlant d'un truc qu'il connaît mieux que les auteurs.
L'avantage de ça, c'est qu'on s'est bien poilés, dans le public, pendant tout le film. Ça ricanait sec.

Bref, c'est clairement pas un très bon film mais au moins c'est rigolo si vous êtes déjà allé (faut pas, c'est illégal, bouh) dans les galeries qui font de Paris un gruyère.

Bande annonce.

* : RFF ou Réseau Ferré de France, entretien la voie ferrée où se trouve la fameuse "entrée touristique". Sans leur autorisation, la prune pour s'y être fait prendre est à un peu plus de 170€. IGC, ou Inspection Générale des Carrières, c'est l'organisme chargé de veiller sur les lieux. Sans autorisation, la prune pour s'être fait prendre dans les carrières est aux alentours 40€ et avoir l'aide de l'IGC permet aussi d'accéder plus facilement sur les lieux ainsi qu'à des recoins difficiles d'accès du réseau.

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